Manon Bril : “Je préfère mille fois cette activité, c’est beaucoup plus fun que la recherche”
Rencontre avec Manon Bril, de la chaîne YouTube “C’est une autre histoire”. Docteure en Histoire contemporaine, elle change les codes avec humour pour nous faire découvrir les détails de l’Histoire.
Tu fais beaucoup de vidéos sur les dieux grecs. Comment t’es venue cette passion pour la mythologie ?
J’ai fait une prépa littéraire et j’ai eu deux professeurs géniaux. C’est là que j’ai commencé à aimer l’histoire. Du coup, j’ai décidé d’aller en fac d’histoire après la prépa. Les récits mythologiques m’ont toujours bien plu, ce sont des histoires épiques.
Tu es docteure en Histoire contemporaine. Pourquoi ne pas avoir choisi une voie plus classique, dans la recherche ?
J’ai commencé la chaîne YouTube pendant ma thèse. Comme ça a bien marché et que ça m’a vite fait vivre, j’ai continué à faire des vidéos. Je préfère mille fois cette activité, c’est beaucoup plus fun que la recherche en soi.
Comment t’es venue l’envie de créer une chaîne YouTube sur l’Histoire ?
Au départ, c’était pour rigoler. J’ai commencé avec le concours “Ma thèse en 180 secondes”, un concours organisé par le CNRS où les doctorants doivent présenter en trois minutes leur sujet au grand public. J’ai eu le prix du public à la finale régionale Midi-Pyrénées et je me suis dit qu’il y avait une audience pour l’Histoire. Dans les mois qui ont suivi, j’ai fait une vidéo sur Toulouse où l’on montrait des petites curiosités de la ville. Je l’ai postée pour la montrer à mes potes, sur Vimeo pas du tout sur YouTube à l’époque. On a eu 90 000 vues, c’était complètement fou, on était personne nous. À ce moment-là, on s’est dit qu’on pourrait peut-être combiner l’expérience de la vidéo avec des sujets qui sont les miens. C’est comme ça qu’on a lancé la chaîne.
Comment choisis-tu un sujet pour une nouvelle vidéo ?
Tout simplement, quand je trouve un sujet qui me semble intéressant. Pour le sujet du sexisme dans l’archéologie, j’ai été contactée par une archéologue qui m’a proposé de travailler dessus. D’autres fois, ce sont des sujets de clients comme les musées, les instituts culturels. On définit alors le sujet ensemble. Il faut toujours que ce soit un angle d’attaque qui m’intéresse. Sur la chaîne, ce sont mes goûts personnels. Des fois, j’écoute aussi les demandes de mon public. Par exemple pour le dernier “relooking mythologique”, j’ai choisi Artémis car c’est le sujet qui m’a été le plus demandé.
En faisant de la vulgarisation historique, as-tu l’impression que l’Histoire semble difficile d’accès ?
La plupart du temps, c’est d’une manière ennuyante. Je voulais proposer autre chose, quelque chose de fun et décalé. Je voulais sortir un peu des formats de reportages classiques, en particulier dans la façon de parler. C’est pour ça que j’utilise de la musique hip-hop et qu’on tourne dehors, pour donner de la fraîcheur. Il y a le sujet et la forme. Toutes les formes sont possibles mais ce n’est pas forcément la chose poussiéreuse et ennuyante que vous avez sûrement eue à l’école ou dans les médias traditionnels.
Tous les premiers mercredis du mois, tu sors une vidéo animée par Leamlu. Pourquoi avoir changé de format ?
C’est elle qui m’a proposé, on a testé l’année dernière avec la vidéo sur le cannibalisme. Comme ça a bien marché, on a continué. On s’éclate à travailler ensemble. J’aime beaucoup découvrir ce qu’elle va faire avec mon texte. Je lui envoie tout l’enregistrement et elle dessine, c’est très agréable comme expérience professionnelle. Comme en plus, ça plaît au public, on a décidé de faire une série. J’ai demandé un financement au CNC pour pouvoir payer Leamlu toute l’année, comme ça je peux lui verser un salaire. Nous sommes donc parties pour plusieurs épisodes.
Tu as participé au festival Les Historiques, à Montbazon. Peux-tu nous raconter ton expérience ? L’exercice de la scène te plaît-il ?
C’est quelque chose que j’aime beaucoup. J’ai fait du théâtre en amateur pendant des années. Parler devant les gens, c’est aussi une activité que j’adore. C’est un tout autre exercice car évidement il n’y a pas de montage donc il faut avoir le rythme en parlant. J’aime bien apprendre mon texte par cœur pour ne pas avoir les yeux rivés sur mes notes. Il faut garder le rythme pour ne pas décrocher le public.
Quel est ton film historique préféré et pourquoi ?
Je suis rarement fan des films historiques car souvent ça m’ennuie vite. Du coup je préfère quand on joue avec l’Histoire, quand on casse les codes ou qu’on fait des trucs drôles. Dans les films historiques, ce que j’aime bien, c’est que tu sais comment va se passer le film et que tu es quand même surpris par la tournure des événements, comme dans Inglourious Basterds de Quentin Tarantino.
As-tu des envies pour la suite de la chaîne ?
J’avais un projet de documentaire mais avec le confinement, ça va être compliqué pour un moment. Le sujet, c’était “comment Instagram nuit au tourisme et au patrimoine ?”. Cependant ça risque d’être compliqué, même après le déconfinement, pour voyager.
Retrouvez Manon Bril sur sa chaîne YouTube : C’est une autre histoire.
Propos recueillis par Pauline Chabert
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